« Timbuktu » de Abderrahmane Sissako

Djingareiber_cour_m Je n’avais pas prévu cet article tout de suite, mais je veux l’écrire tel qu’il me vient, sous le coup de l’émotion, et de manière simple et spontanée. J’ai vu hier soir ce film, en compagnie de mon mari. Tout est encore là en moi, ce matin, en vous écrivant juste quelques mots sur cette heure et demie bouleversante. Juste quelques mots, oui, parce que je ne peux que dire à ceux qui ne l’ont pas fait : allez écouter cette histoire, cette fable tragique. Qui de façon lumineuse, dans le décor majestueux du Mali, tente de sonder l’incommensurable stupidité des hommes, la cruauté des imbéciles, et met face à ces bourreaux guerriers des femmes; belles, sensibles, intelligentes, maîtresses de leurs actes, étonnantes jusque dans la douleur, courageuses. J’ai vu dans ces images pleines de poésie, de dérision, d’humour triste, une ode aux femmes de ce pays, dont la superbe reine noire, folle, drapée de chiffons colorés et son coq sur l’épaule est l’allégorie. Inutile de vous dire que j’ai pleuré, autant de colère que de tristesse, et beaucoup.

 

Mali_football_mJ’ai adoré la scène du match de foot, sans ballon, qui est elle aussi tout un symbole, qui nous dit que l’astuce et l’intelligence savent mettre à bas les interdits idiots. Le début du film, où l’on sourit souvent tant Sissako sait révéler l’absurdité et la sottise de ces hommes du djihad,  laisse cependant affleurer l’approche du drame, pour la famille de Kidane en particulier, parce que ce bonheur ne peut pas durer, on le sait, dans l’austérité que veulent faire régner les « soldats de Dieu ». J’ai tout trouvé beau : le sujet, la façon de le traiter – sans lourdeur, sans radicalisme – les visages, les paysages, les sons…Les voix qui chantent, y compris sous le fouet.

J’ai été totalement touchée par ce film, beau, sensible et intelligent par sa justesse de ton et sa poésie.

Un film pour moi essentiel, gros coup de cœur cinéma, dont voici la bande-annonce